La première acception du mot co-enseignement que nous avons recensé date de la première moitié du XXème siècle. Les autorités académiques souhaitent alors encourager la
politique de gémination c’est-à-dire la mixité des écoles : l’école des filles et l’école des
garçons deviennent mixtes toutes les deux, la séparation par sexe étant remplacée par la
séparation par âge, sans qu’il y ait pour autant mélange des sexes, en classe ou en récréation
. Si les écoles deviennent mixtes, pour autant l’enseignement aux élèves reste
sexué ; une cloison entre les élèves filles et les élèves garçons est installée (matériellement ou symboliquement) en classe, et dans la cour. On parle alors d’« école géminée »
ou de « co-éducation » où faute d’effectif il n’est pas possible de créer plusieurs classes.
c’est le cas dans les écoles à classe unique ou les écoles à 2 classes avec le cours des
Petits et celui des Grands. Ce n’est qu’en 1933 que la loi autorise définitivement la mixité
des écoles, mais toujours pas celle des classes.
Après la 1ère guerre mondiale, le co-enseignement s’ajoute au débat sur la co-éducation.
Garçons et filles ont des facultés différentes (la raison pour les garçons, la sensibilité pour
les filles) : comment l’instituteur ou l’institutrice pourrait-il, pourrait-elle co-enseigner c’est-à-dire enseigner à ces deux êtres tellement différents ? Quant à dispenser l’enseignement
ménager aux garçons et l’enseignement technique aux filles, cela n’est absolument pas envisagé, ni même envisageable. Le co-enseignement est alors défini comme un même
enseignement dispensé aux filles et aux garçons dans une même classe.
Nous retrouvons ensuite le mot co-enseignement (ou coenseignement) à la fin du XXème
siècle. Le terme prend alors un tout autre sens. Il relève non plus de la mixité des classes
mais de la présence d’au moins deux personnes en situation d’enseignement face à un
groupe d’élèves.
La majorité des travaux recensés sur le co-enseignement sont nord-américains. Les premiers à avoir développé le concept de « collaborative teaching » sont Bauwens, Hourcade
& Friend (1989). Ils le définissent comme une approche pédagogique dans laquelle un enseignant généraliste et un enseignant (ou un éducateur) spécialisé travaillent de façon coordonnée et coopérative, enseignent conjointement à des groupes d’élèves de niveaux et
de comportements hétérogènes en situation d’intégration. Le terme « collaborative teaching » est ensuite devenu « co-teaching », et a été traduit en français par co-enseignement.